Vente d’un terrain à bâtir inconstructible : vice du consentement ou vice caché ?
- Céline LAURENT
- 19 mars 2016
- 3 min de lecture

Lorsque la vente d’un terrain à bâtir est remise en question par une décision administrative qui lui est postérieure, déclarant le terrain concerné inconstructible, se pose la question du fondement juridique de la demande en résolution ou en annulation du contrat de vente qui est introduite par les acquéreurs.
La jurisprudence de la Cour de cassation se révèle assez fluctuante, et évolue vers une sévérité accrue à l’égard des acquéreurs.
Dans cette première espèce, un terrain à bâtir a été acquis, par la SCI LES COLONNADES, par acte authentique du 21 octobre 2004, à la SCI LES BERGES DE LA ROSE.
En date du 18 avril 2005, le Maire de la commune a refusé de délivrer un permis de construire à la SCI LES COLONNADES dans la mesure où le terrain était sujet à un risque d’inondations, ce qui fût confirmé par la Direction Départementale de l’Equipement .
Le 11 juin 2008, la SCI acheteuse assigne la SCI venderesse à titre principal sur le fondement de l’erreur et, à titre subsidiaire pour vices cachés.
L’erreur porte le plus souvent sur les qualités substantielles de la chose, dans ces conditions elle doit porter sur un des éléments du contrat qui a été déterminant dans l’engagement de l’acquéreur.
Par le passé, la Cour de Cassation avait considéré comme qualité substantielle le caractère constructible d’un terrain à bâtir (3ème Chambre civile – 21 juin 1995). En l’occurrence, par cet arrêt la Cour avait adopté cette solution même si l’inconstructibilité n’était révélée qu’ultérieurement à l’acte de vente.
La Cour de Cassation n’a pas fondé sa décision sur l’erreur substantielle relative à la qualité constructible du terrain mais a fait droit à la demande de la SCI acheteuse en se fondant sur la garantie des vices cachés (Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile – 20 mai 2014) « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus ».
La jurisprudence est abondante quant aux exemples de vices cachés (risque d’inondation dans un sous-sol, l’instabilité géologique du terrain …) et il convient de rappeler qu’elle opère une distinction pour le jeu de cette garantie entre l’acquéreur non-professionnel et l’acquéreur professionnel, ce dernier étant présumé connaître le vice, sauf preuve du dol du vendeur ou caractère indécelable du vice.
Dans cette seconde affaire, postérieure et jugée par la même chambre, un couple avait acheté un terrain, pour y construire une maison. Un certificat d’urbanisme annexé à l’acte de vente, précisait que le terrain était partiellement constructible car partiellement inondable. Deux mois plus tard, le terrain était cependant classé intégralement en zone inconstructible et le permis de construire fut donc refusé à l’acquéreur qui décida alors de demander la résolution de la vente sur le terrain de la garantie des vices cachés et, subsidiairement, à son annulation sur le fondement de l’erreur sur la qualité substantielle du fait de l’inconstructibilité étendue à la totalité du terrain.
La Cour de cassation ne retient pas la garantie des vices caché estimant qu’au jour de la vente, le terrain était partiellement constructible et donc que la preuve du caractère inconstructible à la date de signature de la vente n’était pas rapporté.
Mais elle écarte également l’erreur sur la qualité substantielle en jugeant que le couple n’avait pu « ignorer l’enquête publique » et avait en outre accepté d’acquérir en toute connaissance de cause un terrain partiellement inondable... et donc partiellement inconstructible.
Qu’il ne pouvait enfin invoquer une décision administrative postérieure à la vente classant le terrain intégralement en zone inconstructible, « l’extension de l’inconstructibilité à toute la surface du terrain, et le refus du permis de construire, n’étant pas inéluctables au jour de la vente. » (Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile – 13 novembre 2014).
SOURCE: http://www.jurisprudentes.net/Vente-d-un-terrain-a-batir.html
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